Le 1er février 2022, Alexia Blondel a reçu le prix La Main à la pâte dans la catégorie « Professeur – formateur » pour son mémoire intitulé Exploitation d’un espace de biodiversité : accompagner les enseignants pour développer les compétences d’observation en sciences chez les élèves. Pour Le Petit Reporteur, elle nous parle de son mémoire mais aussi de son activité.
« Derrière l’aromathérapie et la biodiversité se cachent des enjeux politiques, éducatifs, sociaux, économiques et de santé publique. Cela concerne toute la planète. » (Alexia Blondel)
Une carrière multiple
Avant de se diriger vers l’aromathérapie, Alexia Blondel a mené une carrière au sein de l’Éducation Nationale en tant que professeur des écoles durant dix ans. Elle est ensuite devenue formatrice auprès des enseignants, avant de prendre en 2020 la gestion du centre de ressources en sciences pour les enseignants du primaire, le CRED, basé au jardin botanique du domaine du Deffend près de Poitiers. Elle s’est ensuite spécialisée dans la recherche autour de l’enseignement des sciences à l’école primaire et « plus précisément comment on peut exploiter un espace de biodiversité tout en revégétalisant une cour d’école ».
De la biologie à l’aromathérapie
La raison qui fait qu’elle a des connaissances en biodiversité, en botanique et en biologie, c’est dû à sa formation en biologie à l’Université de Poitiers. Elle a ensuite passé le concours de professeur des écoles et en parallèle elle a repris des études spécialisées dans les plantes aromatiques et médicinales. C’est ainsi qu’elle a démarré, il y a dix ans, une carrière dans l’aromathérapie. « Cette carrière m’a ouvert les portes des fonctions de formatrice et de responsable formation dans les milieux hospitaliers pour pouvoir intégrer les huiles essentielles à l’hôpital. » Alexia Blondel travaille avec la médecine de ville (maison de santé de Bignoux) ainsi qu’avec l’hôpital comme le CHU de Poitiers et d’autres centres de soin en Nouvelle-Aquitaine. Elle est responsable de formation en aromathérapie. Elle forme des groupes chaque année.
Le prix de l’Académie des Sciences
Dans le cadre du CAFIPEMF (certificat d’aptitude aux fonctions de formateur académique), elle a rédigé un mémoire sur le sujet, ce qui lui a valu d’être primée par l’Académie des Sciences en février 2022. « Cette distinction qui m’a été remise dans le cadre de l’Éducation Nationale, c’est un aboutissement dans ma carrière car ça va m’ouvrir des portes pour que ma voix soit plus crédible. C’est une reconnaissance qui n’est pas anodine ». Alexia Blondel explique que les sujets l’aromathérapie ou la biodiversité sont souvent associés à des idées reçues et peuvent être associées à des étiquettes « écolos » et « bobos » de manière péjorative. « C’est un vrai défi de former sur ces sujets en se basant sur des connaissances scientifiques pour s’éloigner des croyances parfois fortement éloignées de la réalité. » Elle ajoute qu’« Au Môyen-Âge, c’étaient les sorcières qui utilisaient les plantes pour concocter des poisons… »
Une volonté de promouvoir les sciences à l’école
« Les sciences à l’école primaire sont importantes, parce que ça fait naître des vocations scientifiques à l’heure où la France manque de professionnels dans le domaine des sciences. Il faut savoir que 86 %(*) des enseignants du 1er degré (école primaire) sont issus des sciences humaines, comme les lettres, l’histoire, la géographie. » C’est pourquoi la fondation La Main à la pâte (en lien avec l’Académie des Sciences) a impulsé l’idée d’« introduire les sciences à l’école primaire ». C’est ainsi qu’Alexia Blondel a intégré l’un des centres pilotes à Poitiers pour réactiver toutes les missions autour des sciences en 2021. Elle a ainsi rencontré des enseignants-chercheurs de l’Université de Poitiers. Elle a vu l’articulation qui existe avec les collectivités pour pouvoir mettre en place l’enseignement des sciences au sein d’un espace de biodiversité. Elle rappelle que « les écoles sont gérées par les mairies ».
La place du dessin d’observation pour mieux comprendre la biodiversité
Dans son mémoire, Alexia Blondel a mis en évidence l’importance du dessin d’observation dans l’enseignement des sciences. « Il faut revenir au dessin d’observation car le dessin est un outil pédagogique qu’il ne faut pas négliger. » Elle ne néglige pas le numérique, qui occupe une place de plus en plus croissante dans l’acquisition des connaissances. « Avec un microscope USB nomade de la forme d’un crayon, il est aujourd’hui possible d’aller observer la nature au plus près. En allant sur le terrain, il est possible d’observer les feuilles, les pucerons d’une manière différente et ainsi prendre conscience de la biodiversité qui nous entoure, même à 4 ou 5 ans. » Elle ajoute que le fait de dessiner nécessite de regarder attentivement l’objet observé, contrairement au simple fait de prendre une photographie. Pour Alexia Blondel, « c’est le meilleur moyen de prendre conscience de la richesse de la biodiversité locale et de la nécessité de mettre en place des aménagements dans une cour d’école, afin de les observer sur plusieurs années ».
Biodiversité et réchauffement climatique
« Aujourd’hui, on met des climatiseurs dans les classes car il fait trop chaud dès le mois de mai », explique Alexia Blondel. « Les enseignants-chercheurs ont leur place dans ce processus réflexif, puisqu’ils apportent des connaissances et des visions sur le long terme qui nous manque. » Elle est également investie dans le conseil municipal de sa commune de Sèvres-Anxaumont (Vienne). Elle participe au groupe transition écologique pour faire en sorte que les élus prennent les bonnes décisions sur des questions en matière de biodiversité sur le plus long terme. « Aujourd’hui, l’espèce humaine est à un tournant, un peu comme les dinosaures à leur époque. » Pour cela, elle travaille avec Jean-Renaud Boisserie, directeur de recherche au laboratoire Palevoprim. Elle a également intégré le conseil des porteurs d’enjeux du réseau Biosena (Biodiversité et Services écosystémiques en Nouvelle-Aquitaine), afin de prendre part aux échanges autour de ces enjeux.
Santé et aromathérapie
« Le domaine de la santé est un sujet qui me tient à cœur », souligne Alexia Blondel. « Comment peut-on se soigner et avoir un bien-être global avec des moyens naturels ? Les plantes médicinales et aromatiques m’ont paru intéressantes. Je les avais apprises à l’université dans l’idée de connaître toutes les espèces, d’en connaître les noms latins, mais pas dans une dynamique santé. J’avais besoin de faire ce parallèle-là qui m’intéressait beaucoup. Dans un premier temps, c’était plus une envie personnelle mais quand j’ai vu le potentiel durant mes études, j’ai eu envie de partager mes connaissances et de les transmettre. » Aujourd’hui, l’aromathérapie, c’est un cabinet qui reçoit des personnes pour des conseils individuels sur des problématiques ciblées de la personne. Alexia Blondel tient à préciser qu’« [elle] vien[t] toujours en complément de la médecine allopathique ». Elle est reconnue pour cela car en 2014 elle a reçu une autorisation pour former dans les milieux hospitaliers des pharmaciens, des médecins, des infirmières ou encore des aides-soignantes. « C’est dû à mon approche scientifique de l’aromathérapie qui se situe dans le cadre de soins de la médecine complémentaire. Il s’agit de soins de support, qui visent à améliorer le confort physique, émotionnel et environnemental de la personne. » L’idée n’est pas de séparer la médecine allopathique et la médecine douce mais d’établir des ponts afin de pouvoir dire quand il s’agit de plantes ou non.
Focus sur les huiles essentielles
« Les micro-organismes nous entourent et nous constituent. Ils sont associés au système immunitaire et au système nerveux », déclare Alexia Blondel. « Tout l’équilibre d’un être humain va être en lien avec ses micro-organismes. Les huiles essentielles permettent d’agir sur ces micro-organismes, tout en respectant les bons micro-organismes. Dans le domaine de l’infectiologie, il y a un avenir certain. » L’aromathérapie, c’est aussi une action sur la gestion des mauvaises odeurs, la gestion des douleurs, la gestion du stress. Ça s’utilise par voie olfactive, par voie cutanée et nécessite une formation pour limiter les risques de mésusages, d’allergie. « Quant à la voie orale, c’est quand même une aromathérapie très traditionnelle française. Ça peut être une goutte d’huile essentielle dans une cuillère à café de miel mais ça reste un usage plus complexe, exclu de l’hôpital. » L’idée est de mettre un cadre sur les pratiques. Alexia Blondel forme le personnel médical et paramédical à l’utilisation des huiles essentielles en milieu hospitalier. Pour initier le grand public, elle a écrit deux livres, Ma boîte à outil des huiles essentielles (2018) et Mon cahier huiles essentielles au féminin (2019). Elle anime également des ateliers. Ainsi le vendredi 3 juin 2022, elle était au Jardin botanique de l’université de Poitiers pour une session de formation en aromathérapie pour le professionnels de la santé. Elle a aussi animé des ateliers destinés au grand public : « La pause aromatique au travail » de 12h30 à 13h30 et « La trousse d’urgence estivale aux huiles essentielles et aux plantes » de 17h30 à 18h30. Voici quelques extraits en images :
Il est possible d’avoir plus d’informations sur le site web d’Alexia Blondel et en la suivant sur Instagram. Retrouvez également l’interview sonore d’Alexia Blondel par Le Petit Reporteur :
(*) Les PE (professeurs des Ecoles) sont majoritairement issus de licences littéraires, en sciences humaines et sociales, histoire, géographie et langues. Seulement 14 % d’entre eux ont eu une formation universitaire scientifique, p22 extrait du rapport de l’Académie des sciences et de l’Académie des technologies sur la pratique et la formation en science et technologie des professeurs de l’école primaire. « Science et technologie à l’école primaire : un enjeu décisif pour l’avenir des futurs citoyens », paru en novembre 2020.
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