La PMA est un sujet que la BD aborde rarement. La scénariste Céline Gandner a voulu porter le sujet à travers son propre parcours PMA. C’est ainsi qu’en mars 2022, l’auteure sort le roman graphique PMA, à la recherche d’une petite âme aux Éditions Delcourt.
« En 2018, j’ai entamé le parcours PMA. J’ai rencontré le professeur René Frydman, le « père » d’Amandine, le premier « bébé-éprouvette » né en 1982 », explique Céline Gandner qui, après une brillante carrière, a tourné la page pour commencer un parcours PMA. De ce parcours, un roman graphique s’est imposé petit à petit.
Céline Gandner s’est occupée des documentaires « culture » à France 5. « J’étais en charge, avec mon responsable, de documentaires « art & culture » puis je suis partie sur des documentaires type Société et investigation. » Après vingt-et-un ans, elle décide de changer de vie. Elle ne renie pas qu’il s’agit d’un « métier passionnant ». « J’ai cependant sentie que je tournais à vide. » L’auteure met deux ans pour franchir le pas car « c’est une grande décision à prendre ». Elle est alors consciente qu’elle quitte quelque chose de très sécurisant et très valorisant pour l’inconnu. « C’était comme un appel criant du fond des tripes. Il fallait que je me réalise. » Elle est aussi consciente que le regard des autres pèse beaucoup à ce moment-là. À ce moment-là, le télétravail n’existe pas encore. « Il n’y avait pas autant de quête de sens dans son travail. » Elle est consciente qu’aujourd’hui, les choses seraient différentes. « Tout le monde cherche un sens à son travail. » Ce désir de changer de vie remet alors tout en question chez Céline Gandner, tant familiale, amicale… mais « quand la décision vient de votre cœur, vous dépassez tout ».
Une auteure engagée
« Je n’écris que lorsque je suis habitée par mes sujets. J’écris au gré de ce qui me traverse, des rencontres que je fais », confie Céline Gandner. Avec PMA, à la recherche d’une petite âme, elle aborde un sujet peu médiatisé, comme elle l’avait déjà fait avec Je suis Sofia. Ce premier roman graphique s’intéressait à la transidentité à travers l’histoire de Sofia, une personne transgenre. Pour sa prochaine histoire à paraître, elle est allée à la rencontre des agriculteurs, qui changent leur méthode d’approche de la terre. Elle a également le projet d’écrire sur l’épigénétique. Céline Gandner souhaite aussi revenir aussi sur la première génération PMA, qui a ajourd’hui entre 35 et 45 ans. « Les questions de la filiation, du droit du sang et du droit du cœur m’intéressent beaucoup », confie-t-elle.
Faire de son parcours PMA un guide
« À l’époque où j’ai entamé mon parcours PMA, on en parlait peu. D’ailleurs, comme le soulignait le professeur René Frydman, nous étions totalement dans l’illégalité. » Pour ce projet de roman graphique, le sujet s’est alors imposée à Céline Gandner, parce qu’elle le vivait et qu’à ce moment-là, elle démarrait ses démarches de PMA. « Il n’y avait rien sur le sujet concernant mon profil, à savoir une personne hétérosexuelle, solo et faisant appel à un don de sperme anonyme. » Elle se dit ainsi qu’il devait y avoir forcément des femmes qui allaient être comme elle à un moment donné. Céline Gandner a donc voulu faire partager son parcours et faire en sorte que ce livre soit une aide, un accompagnement pour beaucoup de couples. « Pari tenu, j’ai de bons retours des gens lors des mes dédicaces. »
C’est quoi le métier de scénariste ?
« Le métier de scénariste est extrêmement mal connu. » Céline Gandner précise que le scénariste écrit tout. Il écrit aussi bien la voix off, les dialogues, ce que l’on voit dans les images, le découpage des planches et des cases aussi bien que les émotions et les couleurs. « C’est la raison pour laquelle j’ai dû suivre une formation à l’école CESAN. Je ne savais effectivement pas comment faire au départ. » S’il y a des dessinateurs qui ont besoin de liberté, d’autres, en revanche, ont besoin d’avoir beaucoup d’éléments. C’était d’ailleurs le cas pour Je suis Sofia. « Scénariste, ce n’est pas être aux manettes, il faut savoir faire confiance. Après avoir écrit le scénario, un autre artiste va s’emparer de toute cette masse d’informations avec son imaginaire et voir comment les choses vont pouvoir fonctionner ou pas. C’est la magie qui opère. »
Retour sur l’écriture du scénario…
« Huit ou neuf mois après avoir quitté France 5, après une séance chez une thérapeute un peu particulière, je suis rentrée chez moi et je me suis mise à écrire. » Céline Gandner écrit alors PMA. Elle contacte ensuite un éditeur qui lui demande de lui envoyer ce qu’elle a commencé. « C’est super, lui dit-il, le ton est là, le contenu est là. Maintenant, il faut que vous écriviez un scénario de bande dessinée. » Pour cela, elle a fait une formation à l’école CESAN, où « toutes les semaines, [elle] produisai[t] [s]es planches à l’écriture ». La professeure qui travaillait avec Delcourt l’a ensuite mise en relation avec son éditeur. Mis à part l’ajout d’une phrase de conclusion, tout tenait la route. « Il faut dire que le travail avait déjà été bien fait avec ma professeure. Elle avait filtré toutes les questions que j’aurais pu avoir. Elle m’avait fait beaucoup travaillé sur mon personnage pour qu’il soit bien identifié : de quoi il vit ? combien ça va lui coûter ? qu’est-ce qui se met en place pour elle ?, etc. » Céline Gandner précise qu’elle a dû montrer des moments de doute. « Je suis une personne solaire et il m’a fallu aller chercher ça, ce n’était pas dans mes habitudes. »
… à la mise en dessin
Pour les dessins, c’est le directeur de l’école CESAN qui la met en relation avec Pauline. « Tout de suite, elle a adhéré au projet. Elle venait de termine le cursus long de l’école et elle était sensibilisée au projet. Elle a réalisé quatre planches que nous avons envoyées, après quelques aller-retour, à l’éditeur et nous avons signé. Nous nous sommes ensuite rencontrées à plusieurs reprises. Avec la pandémie, nous avons travaillé à distance à raison de quinze à vingts planches. Nous avons ainsi produit 190 planches durant le confinement. » Céline Gandner tient à préciser que pour mener un tel projet jusqu’au bout, « il faut avancer ensemble. Il doit y avoir une véritable collaboration entre le scénariste et le dessinateur. Le scénariste ne doit pas avoir l’ascendant sur le dessinateur et inversement. »
PMA, à la recherche d’une petite âme est sorti en mars 2022. Il permet à tous ceux et à toutes celles qui s’interrogent sur le parcours PMA de bénéficier d’un guide, inspiré d’une histoire vraie, celle de Céline Gandner elle-même. L’auteure se dit aujourd’hui satisfaite car le roman graphique ainsi est devenu le livre de chevet pour beaucoup de personnes.
Vous pouvez retrouver Céline Gandner sur Instagram. À noter que le livre est référencé dans certains CECOS de Paris et recommandé aux patientes.
Évaluez notre article
Note moyenne 5 / 5. Nombre de vote : 2
Il n'y a pas encore de vote !