À la rentrée 2006 le film Je vais bien ne t’en fais pas, adapté du livre éponyme d’Olivier Adam, sort au cinéma. Il aborde un sujet délicat avec justesse et sans pathos : l’absence et le deuil. Il révèle aussi l’actrice Mélanie Laurent, meilleure espoir féminin.
Après un séjour d’un mois en Espagne, Élise (Mélanie Laurent), 19 ans, retrouve son père (Kad Merad) et sa mère (Isabelle Renauld) mais Loïc, son frère jumeau, est absent. Ainsi commence le film de Philippe Lioret, Je vais bien ne t’en fais pas.
Je vais bien ne t’en fais pas, un film sur l’absence
« Ton frère est parti », lui annonce sa mère. « On s’est engueulés. Il a dit qu’il ne voulait plus me voir », précise le père. Peu à peu l’absence devient inquiétante. Désespérée de ne plus avoir de nouvelle de son frère, Lili laisse éclater sa colère : « Si ça se trouve, il est mort […] Il m’aurait appelée sinon. […] S’il était vivant, il m’appellerait. Moi, il m’appellerait ! Je me suis pas engueulée avec lui, moi. Je lui ai laissé je ne sais pas combien de messages, il rappelle pas, il répond pas et maintenant sa messagerie est pleine ! » Peu à peu cette absence devient maladive…
La dépression
Je vais bien ne t’en fais pas aborde la dépression sans pathos. Lili ne dort plus, ne mange plus… Elle se laisse mourir… « Si tu ne manges pas, tu vas très vite avoir de gros problèmes de santé […] Il ne faut pas laisser ton estomac perdre ses fonctions, ce serait très grave », lui dit le médecin venue la consulter. Elle est si faible qu’il l’hospitalise de force. À son arrivée, l’infirmière lui retire ses livres, son baladeur et surtout son téléphone. La jeune femme continue toujours de refuser de s’alimenter. Son état de santé empire au fur et à mesure. « Il faut manger, c’est comme ça ! », déclare l’infirmière. Le corps médical apparaît froid, inhumain, droit dans ses bottes. « Ça ne sert à rien de venir la voir. Si on ne vous dit rien, c’est qu’il n’y a rien à dire, il faut attendre. Croyez-moi, si on la met à l’isolement, c’est pas de gaieté de cœur. C’est pour son bien. […] On ne va pas remettre en cause 50 ans de psychiatrie », explique sèchement le psychiatre aux parents venue la voir. « Si vous voulez qu’elle guérisse vite, il faut se plier au protocole, c’est la seule solution. » Plus tard, son amie rencontrée en Espagne, Léa (Aïssa Maïga), aidée de son petit ami Thomas (Julien Boisselier), tentent de la faire sortir de l’hôpital mais ils sont rattrapés. Le psychiatre explique alors aux parents qu’ils ont été obligés de l’attacher. L’hôpital psychiatrique n’a pas bonne réputation et le film le montre clairement. Face à la lente agonie de Lili, les parents sont passifs face au corps médical qui ne les écoute pas et les laisse dans le flou sans leur donner la possibilité de voir leur fille. « Arrêtez de prendre ce ton-là avec moi, comme si j’étais un demeuré ! », fini par s’agacer le père.
Une lettre qui change tout
Finalement, c’est une lettre qui gagne sur le traitement médical car après avoir reçu une première lettre de son frère, Lili se remet à manger, son état s’améliore et elle peut rentrer chez elle. Le film Je vais bien ne t’en fais pas pose la question suivante : « Jusqu’où un père peut-il aller pour sauver sa fille ? » À l’hôpital, le père avait dit au psychiatre refusant de l’entendre : « C’est ma fille et je sais très bien ce qui est bon pour elle ! » La solution est d’ailleurs donnée lorsque le père prend sa voiture au moment où le facteur arrive à vélo. Puisque Lili n’a pas d’appel de son frère, elle aura des nouvelles par voie postale. Commence alors un jeu de piste pour la jeune femme. Elle reçoit du courrier de son frère par-ci par-là et se demande bien où il peut être. De son côté Thomas tombe petit à petit amoureux de Lili. Il lui trouve un petit appartement et lui propose même de venir le rejoindre en Bretagne aux prochaines vacances. Cependant, Lili refuse le bonheur qu’on lui tend. Elle veut partir dans la Creuse chez sa copine Léa… C’est sans compter sur son père qui lui parle de la Bretagne, où Lili décide d’aller finalement. Elle y est rejointe quelques jours plus tard par Thomas… Le lendemain de leur retrouvailles, elle découvre enfin qui lui a envoyé les lettres et une fois rentrée à Paris, Lili annonce à son père qu’elle sait pour les lettres. « C’est pas Loïc qui a écrit les lettres, dit-elle à sa mère, […] c’est papa. Faut pas lui en vouloir, sans les lettres, je ne serais plus là. »
La vie avant tout
Les dix dernières minutes du film Je vais bien ne t’en fais pas révèlent tout le fin mot de l’histoire au spectateur. Alors que Thomas arrive en avance chez les parents de Lili le dimanche suivant, il leur annonce qu’il a découvert la tombe de Loïc. « Il faisait de l’escalade à l’UCPA. Il est tombé. C’était pendant que Lili était en Espagne, il y a un an », avoue le père. « Vous n’allez pas lui dire », demande la mère inquiète. Les parents ont ainsi préféré ne rien dire à leur fille pour la préserver de la mort de son frère jumeau, jouant ainsi sur les querelles entre le fils et le père. Lorsque Lili arrive, Thomas lui annonce qu’il a quelque chose à lui dire. Visiblement elle aussi mais c’est finalement un « Je t’aime » qui sort de la bouche de Thomas.
Plutôt qu’un film sur la mort, Je vais bien ne t’en fais pas est une ode à la vie. Alors que Lili s’enfonce dans la dépression face à l’absence inexpliquée de son frère, le père invente un stratagème pour la sortir de cette spirale infernale. Et c’est un nouveau non-dit qui la pousse vers la vie à la fin du film. Le passé étant ce qu’il est, il vaut mieux regarder vers l’avenir, l’amour, la vie.
Mention particulière pour « U turn – Lili » de Aaron, découvert grâce à Je vais bien ne t’en fais pas. Le titre a été spécialement écrit pour le film.
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